Km 13’598, Mubende, Ouganda.
Un africain ne dit jamais « non » ou « je ne sais pas ». Il dit « oui » ou invente n’importe quoi…
Et là je tiens à m’excuser auprès de tous les africains, ainsi qu’aux amoureux de l’Afrique, de tenir des propos si généraux… En Afrique on compte 54 états indépendants de toute les tailles et formes possibles et imaginables représentant des milliers de langues, de cultures, de traditions. Avec mes 5 pays traversés totalisant 7’500 km sur sol africain au fond je n’ai pas vu grand chose de l’Afrique. Ces cinq pays totalise à eux seul près de 280 millions d’habitants. Combien en ai-je vu ? Quelques milliers que j’ai croisé, quelques centaines à qui j’ai parlé. Et quelques douzaines, à peine, avec qui j’ai partagé. Alors désolé de généraliser n’empêche que depuis le Caire c’est toujours la même rengaine. Quand je demande mon chemin (ou autre chose) à quelqu’un qui n’en sait rien il m’envoie n’importe où, n’importe comment alors simple « non » passerait tellement mieux. Bref il répond n’importe quoi 80 % du temps…ce qui n’est pas pratique, sauf si tu as du bol. Ainsi hier, après avoir demandé ma route à plusieurs personnes à la sortie d’un rond point bi-directionnelle, je croyais me diriger en direction de Fort Portal et des alentours des Mts Ruwenzori, afin de rejoindre le Rwanda par le très beau Queen Elizabeth National Park… Oui je croyais.
Oui mais non, la même réponse du Caire à Kampala
Ce matin, après 140 km de détour, tu vois je l’ai bien là, profond. Et oui Je me souviens bien… Je me souviens du Caire, lorsque que demandant la direction d’un fameux magasins de vélo, deux hommes se disputèrent pour me donner la bonne. Plus tard un autre me fît partir au sud
– tu prends la première à gauche, là tu arrives à un carrefour et continue tout droit. Ensuite.. etc ».
J’ai pris la première à gauche. Pas de carrefours. Après 25 mètres j’étais baisé. Bon je reviens sur mes pas. Je croise un autre homme.
– Oh oui c’est très simple alors tu prends la première à droite (!), ensuite au rond point tu prends à droite jusqu’à rejoindre la route principale et là tu continues, le magasins est sur la droite tu peux pas le louper !
Mon cul ouais !!! J’ai trouvé la route principale, quant au magasin de vélo, il pédale toujours… Bref après 30 km sur toute l’après-midi à tourner ainsi en rond j’ai trouvé un magasin de vélo situé à la base à 5-6 km de chez moi. Finalement c’est un policier qui avait pu m’aider.
A Khartoum (Soudan) ce fût pareil lorsqu’en cherchant une auberge de jeunesse dont je connaissais l’adresse exacte (mais les rues sont rarement indiquées) je me suis retrouvé au milieu d’une sorte de bidonville. Là on me fit comprendre que les blancs n’était pas bienvenus et que l’auberge de jeunesse était dans l’autre direction. A 20 km de là tout de même. J’avais baisé mon après-midi et avais trouvé l’auberge plus d’une heures après la tombée de la nuit.
Le lendemain j’ai essayé autre chose. J’ai demandé une rue au premier inconnus venu. Là, hésitant un peu, il m’indique le chemin à prendre. Problème : cette rue n’existe pas, puisque c’est moi qui l’ai inventée… D’où mes doutes justifié.
Et même sur les hauts plateaux éthiopiens la réponse est toujours la même
En quittant Addis Abeba (Ethiopie) j’ai vécu pareil ou presque. Je me suis retrouvé sur la vallée parallèle à celle prévue, après que deux hommes m’aient affirmé me trouver dans la bonne direction. C’est en m’arrêtant boire une bière, trente km plus loin, que j’ai pris conscience de mon erreur, lorsqu’un homme se moqua carrément de moi. Heureusement une route reliait les deux vallées à travers un très beau col à lus de 3’000 mètres d’altitude. Le détour était certes d’une centaine de km mais au moins la route était belle et en valait la peine.
Mais hier…bon dieu j’ai pas été gagnant au change diras-t’on ! En quittant Kampala Je m’embarque donc en direction de Fort Portal et l’ouest de l’Ouganda. Du moins je le croyais. Le début était bondé, inintéressant. Je m’y attendais, sortir de Kampala c’était comme y entrer, pénible et dangereux. Puis j’ai continué tranquillement, dormi dans une « Police Station » comme il m’arrive de faire de temps en temps lorsque je ne trouve rien de sûr. Les bivouacs chez les policiers sont pas des plus romantiques mais ici ils m’assurent la tranquillité, un endroit sec pour planter ma tente (parfois à l’intérieur), j’obtiens toujours de l’eau pour me laver, de l’électricité pour recharger mon portable. Et le tout est gratuit et par conséquent me permet d’économiser après les traversées des grandes villes où tout est plus chère.
Le lendemain était horriblement humide. Il a plus pendant 15 heures d’affilées, ce qui n’est pas commun en saison des pluies ou normalement la pluie tombe sous forme orageuse. Trempé, après quelques heures de routes j’arrive à ce point où il est écrit « Uganda Equator ». Là on trouve plein d’objets futiles pour attirer les touristes…Et c’est donc la frontière entre l’hémisphère sud et nord. Cela dit sur le coup Je commence (enfin) à comprendre que quelque chose cloche. En me dirigeant vers Fort Portal je devais remonter sur le nord-ouest et Kampala étant déjà dans l’hémisphère nord je ne devais traverser l’équateur une centaine de km après Fort Portal et non pas 200-250 km avant Fort Portal… et effectivement me voici baisé (décidément) en direction direct du Rwanda. Si je continue sur cette route je vais manquer les superbes montagnes de l’ouest de l’Ouganda. Et surtout mon visa Rwandais n’est valable que dans une semaine alors qu’avec cette direction je devrais rejoindre le Rwanda dans 2-3 jours maximum, même en baissant le rythme.
Bref, l’hémisphère sud attendra un peu… Je suis descendu 70 km trop au sud, reste à les remonter. Ne trouvant pas de bus acceptant de me remonter à des prix dans mes cordes, je décide de revenir à vélo. Heureusent le soleil refait son apparition. Malheureusement un second rayon cède. Décidément…Certes je m’y attendais un peu, le premier rayon ayan logiquement affaibli quelques autres qui ont du compenser. Mais cette fois me voici parti pour réparer tout seul…
En quittant Lausanne et mes amis j’avais eu la bonne idée (et mon partenaire matériel, BBR Cycles, également. Je les en remercie au passage) de m’embarquer avec quelques rayons en rab’. Certains voyageurs s’étaient bien foutus de moi… cumulant ainsi du poids pour « rien » Mais aujourd’hui je ne le regrette pas, au moins je peux continuer. En espérant que ça tienne cette fois (ah l’espoir!)…
Finalement, après un détour total de 150 km j’ai retrouvé ma route… Cette fois ça y est, je suis bien en direction de Fort Portal. Km après km la circulation diminue, les villages s’éloignent les uns des autres, la végétation gagne du terrain et parfois c’est presque la forêt vierge. Par contre finit les violents orages, la pluie est fine… mais dure plusieurs heures à chaque fois. Ce qui au bout du compte n’est pas plus agréable.
Peu à peu je m’enfonce donc dans une épaisse végétation et bien qu’asphaltée et pas mal fréquentée ma route est plutôt belle. Alors oui j’ai retrouvé mon chemin, mais non sans peine. Pour le reste je suis toujours (et même de plus en plus) en Afrique. Mais à ce rythme là j’en suis pas sorti non plus…
Oui ou non ? (là l’africain dira « oui », toujours « oui »).
Le soleil gagne l’horizon. Le temps file, l’horloge tourne et chaque jour passe plus vite que le précédent. Au fond c’est plutôt bon signe mais à la surface c’est plutôt emmerdant… Heureusement (!) Le Cap est encore loin!