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A la découverte du Mayombe

Km 35’508, Pointe-Noire, Congo-Brazzaville.

-La découverte du Congo-Brazzaville continue en direction de l’océan Atlantique et la traversée du Mayombe-

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La traversée du Mayombe, dans la forêt tropicale (biosphère de Dimonika)

C’est dans la chaleur et l’humidité que j’ai traversé le Mayombe, en direction de Pointe-Noire, deuxième ville du pays et capitale économique du Congo-Brazzaville, située sur les côtes de l’Atlantique.
Avant cela, déjà, chaque km avait son lot de sueur. Parfois de grosses perles de sueurs tombant le long du front, le dos ou un peu partout. Alors lorsque je me lance à l’assaut du Mayombe c’est une autre histoire. Me voici maintenant dans la forêt tropicale, sur un vaste terrain de collines -montagnes- de basses altitudes. Bien qu’asphalté, le terrain m’est pénible. L’humidité épuise. La chaleur étouffe. Je cherche l’ombre. Attend que le nuage s’arrête sur ma tête. Ou que le bord de la route soit dégagé, sous un arbre m’arrêter. De toute façon bien que moins ensoleillée, l’ombre est tout humide elle aussi…
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Heureusement la circulation est bien moindre qu’annoncée.

Heureusement la circulation est bien moindre qu’annoncée. Pas les moustiques. Suicidaires ils viennent sans cesse me taquiner. En fait c’est une guerre ouverte. J’en ai des envies génocidaire. La faim justifie les moyens…
Puis, comme prévu, je quitte la RN1 retournant sur les pistes.
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Puis, comme prévu, je quitte la RN1 retournant sur les pistes.

Me voici maintenant dans la biosphère de Dimonika. Les arbres géants, la verdure omniprésente, le bruit de la faune. 7 km de montée presque ininterrompue. 7 km de transpiration totalement ininterrompue.
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Me voici maintenant dans la biosphère de Dimonika.

Enfin j’arrive a Dimonika, le village cette fois. Me voici trempé. Trempé à en essorer mon t-shirt. Je demande alors où vit « le blanc ».
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Enfin j’arrive a Dimonika, le village cette fois.

-tu vois le grand arbre ? ( un arbre aussi haut que beau) c’est là bas qu’il habite. Tu n’as pas des medicaments? Je suis malade!!? (…)
En effet derrière le grand arbre que l’on ne peut manquer depuis le village, se trouve « la maison du blanc ».
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En effet derrière le grand arbre que l’on ne peut manquer depuis le village, se trouve « la maison du blanc ».

 Je suis attendu puisque le jour d’avant à Dolisie, 3ème ville du pays, j’ai rencontré Eric, un français qui travaille à Dolisie. Il m’indiquait ce bel endroit, sur ma route en direction de Pointe-Noire, et nous nous retrouvons le lendemain, accompagné d’autres amis.
Et c’est avec pain, jambon et fromage que l’on m’accueil. Made in France. Ajoutez-y une bière fraiche, l’instant est magique pour mon estomac d’Européen. Et moi je n’ai jamais autant aimé la France et sa gastronomie…
« Le blanc » quant à lui c’est Yann, un flamand qui vit depuis une dizaine d’année en Afrique. Il s’est installée ici voici près d’un an. Il est le seul blanc ici, et il m’explique quelques moments de sa vie, des anecdotes africaines.
Après être parti au Congo-Kinshasa, il a tout perdu. A tel point qu’il n’avait plus de quoi rentrer en Europe. Il me raconte la situation, rarement décrite car inhabituel, du blanc qui est pauvre en Afrique. Celui que tout le monde rejette. Les noirs car ils ne voient pas d’intérêt au blanc qui n’a d’argent à dépenser. Pas plus pour le taxi que pour le cireur de chaussures. Enfin les autres blancs qui s’éloignent par peur de se voir demander de l’argent.
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« La palette de peintre »comme dise certains. Une plante dont je ne connais le vrai nom.

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Yann se trouve ici, dans cette biosphère qui n’en est pas vraiment une

Après avoir remonté la pente, Yann se trouve ici, dans cette biosphère qui n’en est pas vraiment une. Ou l’argent envoyé par l’UNESCO a été distribué entre les ministres et autres « politiques » sans être jamais utilisé pour la préservation de la faune locale. Un véritable gâchis.Toujours le même en Afrique. Aucune infrastructures, rien. L’argent est pris et distribué. Rapidement dépensé. Jamais sur la durée.
De plus les forêts disparaissent de jour en jour mais Yann sait rester positif.
« Positif mais réaliste » ajoute-il simplement.
Aujourd’hui ce qu’il veut c’est l’autarcie. L’autosuffisance. Apprendre aux gens à retrouver leur « indépendance » en quelques sortes. Car ici dans ces villages isolés c’est un peu la débauche. On cherche l’or et lorsque qu’on le trouve on fait la fête. Alcool, prostitution, musique… Et puis on recommence à chercher de l’or une fois qu’on a dépensé tout notre argent. Au village de Dimonika il y a d’ailleurs un moyen bien simple de savoir si de l’or a été trouvé: c’est de se rendre au bar. Plus la musique y est forte, que les gens dansent et que des prostituées ont été amenées du village voisin (plus grand), plus on aura trouvé d’or.
Ce soir là pourtant, à la surprise de Yann, la musique était calme. Les gens ne dansaient pas. L’or ne pousse pas tous les jours à Dimonika. Mais presque.
C’est donc les plus jeunes qu’il prend avec lui pour leur apprendre à triller les déchets, tenir un jardin dans la durée, entretenir une source d’eau correctement. En fait à penser sur la durée, ce qui n’est pas vraiment le cas pour les gens vivant dans ces villages, plus habitués à vivre au jour le jour, dicté par « la gratitude instantanée » depuis des millénaires. C’est à dire la cueillette (les fruits), la chasse. Sans moyen de conservation, tout est consommé rapidement. On ne vit que pour aujourd’hui.
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C’est surtout avec les plus jeunes que Yann compte développer un esprit plus « écologiste », afin de préserver la faune et vivre en autonomie.

Dans cette région magnifique, au potentiel inexploité, Yann cherche donc des volontaires pour l’aider. Des jeunes ou plus âgés qui seraient intéressé à venir l’aider dans cet environnement beau et surprenant. Humide et pleins de vies. Et développer avec lui son projet de créer, petit à petit, une communauté vivant en autarcie, de l’autosuffisance au niveau local. Et quitter ainsi ce système de dépendance, sorte d’escalave des masses, qui semble bientôt contrôler le monde entier: Le Nouvel Ordre Mondial.
Quant à moi c’est sur Pointe-Noire que je continue. C’est un autre or qui semble vouloir m’attirer dans ses filets: l’or noir. A moins que ce soit l’Atlantique, que je retrouve 6 mois après l’avoir laissé, alors au Cap. Un autre monde…
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Pédaler dans la biosphère de Dimonika

Olivier Rochat

 

Un Cargo au Congo

Km 35’175, Brazzaville, Congo-Brazzaville.

Voici une semaine que je me trouve à Brazzavile, la capitale de la République du Congo. Ayant obtenu mes visas pour le Gabon et le Cameroun, je vais reprendre la route bientôt. Mais avant cela j’ai pris le temps de mettre mon blog à jour avec 5 articles retraçant mes 4 semaines de routes à travers ce pays d’Afrique centrale, marquant mon retour -retour bienvenu- dans la francophonie.

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Durant ces 4 semaines de routes j’ai pu découvrir différent aspects du Congo-Brazzaville, dont certains m’ont beaucoup plu.

Le rapport avec les gens, l’hospitalité rencontrée dans les villages, pédaler dans la forêt tropicale, avoir un nouveau compagnon de route pour quelques temps ou encore traverser le très surprenant « désert vert », tels ont été les principaux interêts routier de ces 4 semaines, traçant un itinéraire de 1’600 km, dont plus de 900 de pistes.

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le très surprenant « désert vert »

Les articles écrits:

Bonjour Papa

La Sardine d’Or

Pas de Gabon mais un nouveau compagnon

Une journée dans la Jungle

Le désert vert

Et pour terminer, voici quelques photos prises le long de la route:

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Les enfants dans la mission de Mbinda lors de notre attente -avec Pedro-, alors que la frontière du Gabon était fermée

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Beignet et bananes. Les aliments les plus fréquents sur les marchés, même isolés.

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Ananas

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Coucher de soleil sur les Plateaux

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Les routes du Congo.:goudron ou piste? Ou les deux non?

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Une rivière dans la forêt équatoriale

 

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Le désert ver. Spectaculaire et unique.

 

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Les fruits exotiques…

 

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Bonne nuit

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Macher dans la Jungle pour trouver son eau

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La Nature

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Le fameux « désert vert » encore une fois

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On charge (photo prise par Pedro)

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Avec le prêtre de la mission de Komono

Olivier Rochat

 

Le désert vert

Km 34’800, Djambala, Congo-Brazzaville.

Un désert au Congo? vous étonnerez-vous. Pas étonnant qu’il soit vert dans cette région.  Allez, ne vous imaginez pas non plus le Sahara, il s’agit d’un plateau rempli de collines sableuse. Un sable recouvert… d’herbe verdoyante, parfois de petits buissons, d’ou le titre de cet article. La traversée, ou plutôt l’arrivée, des plateaux par  ce « désert vert »  a donné une certaine ampleur à cette aventure au Congo-Brazzaville. En effet j’y ai roulé pendant près de 2 jours sur une route magnifique qui longe les crêtes des collines amenant des montées et descentes incessante. Et entouré d’un paysage unique dans mon voyage. Un moment très particulier, si proche de la forêt tropicale, mais si différent.

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Le « désert vert »

Je retrouve ma solitude

Après 10 jours passé avec Pedro, nous nous sommes séparé. En effet j’avais initalement prévu de retourner à Brazzaville pour y faire mon visa pour le Cameroun, avant de revenir sur le Gabon par la suite, alors que Pedro a finalement décidé de le faire directement à Libreville, la capitale gabonaise, puisque la frontière a enfin daigné se rouvrir. Mais ce n’est que provisoire puisqu’avec la bonne entente que nous avons partagée, nous prévoyons de nous retrouver plus tard, d’ici quelques semaines, au Cameroun probablement.  Si tout va bien.

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Je retrouve ma solitude

C’est en bordure de la forêt équatoriale que nous avons repris nos chemins solitare, à plus de 500 km de Brazzaville. Cependant, pour revenir dans la capitale congolaise j’ai du faire un grand détour puisque la région du Pool, régulièrement en proie a des combats, à vécu quelques jours de tension dernièrement, amenant la mort de 4 policiers. Si, par manque d’information, j’avais traversé cette partie du pays en quittant Brazzaville, y revenir équivaudrait à prendre certains risque inutiles, surtout à vélo.

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Le désert vert, un détour qui vaut la peine…

La seule solution qui s’offrait à moi était de contourner le Pool pour atteindre Brazzaville par le nord. Pour cela je dois me rendre dans la région des plateaux. Une région qui se trouve au centre du Congo-Brazzaville et isolée s’y je prends en compte le versant qui m’y amène. En effet il faut traverser une région que les habitants de la région appellent  « désert ». En réalité il s’agit de collines verdoyantes et sans forêt, sauf parfois au pied des collines. Une des particularité de ces collines est qu’elles sont faites de sables, le climatest y est plus sec que sur les forêts qui l’entoure, notamment au nord et à l’ouest. Heureusement la route est, quant à elle, faite de latérite, une roche rouge, permettant ainsi d’avoir une route roulable à vélo, et non pas sableuse.

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La route est, quant à elle, faite de latérite, une roche rouge, permettant ainsi d’avoir une route roulable à vélo, et non pas sableuse.

Mais qu’elle solitude

Durant plus de 100 km je me retrouve a grimper des collines incessantes dont parfois l’état de la route m’oblige à pousser mon Cargo. Pas un village, pas un point deau et pas une seule âme humaine pour plus d’un jour, sur une durée de 106 km. La forêt équatoriale me parait si loin, mais pourtant c’était hier.

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C’est en « attaquant » la première colline que je quitte, soudainement, la forêt équatoriale que je laisse derrière moi

La nuit, après un coucher de soleil magnifique, j’ai maintenant droit à tout cet espace pour moi. Pour moi seul… Comme ce fut souvent le cas en Egyote, au Botswana ou en Namibie. Mais le décor est cette fois différent.

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La nuit, après un coucher de soleil magnifique, j’ai maintenant droit à tout cet espace pour moi. Pour moi seul…

Pas de pluie le lendemain mais un épais brouillard le matin, amenant de l’humidité. Humidité difficile lorsque le soleil surgit, dès 9 heures, beaucoup plus tôt que dans la forêt. Un  » petit » 30°C m’apparaît comme un bon 40, en quelques km je m’épuise, transpirant incessamment. La route n’apparaissant pas sur les cartes je me fie au renseignement des locaux qui mindique des distances raccourcies par rapport a la réalité. Il me reste alors 1 litre d’eau pour les 35 derniers km. Impossible de trouver de l’ombre… sauf sous les nuages s’ils j’arrivent à m’y trouver dessous.

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Impossible de trouver l’ombre

Le reste ne sera que gestion, arrivant a Kebara, le premier villagea après ce  » désert « , épuisé, ne trouvant plus de force pour faire fonctionner mes muscles déshydratés. Les 6 derniers km de montée, terrible mais entouré d’une savane verte et magnifique, furent vécu comme entre deux eaux, entre enfer et paradis. Certaine partie de la montée sont trop sableuse pour être pédalée, d’autre suffisamment pour raide pour m’obliger à devoir pousser mon Cargo. Pourtant en arrivant au sommet de cette dernière colline, la plus longue et dure de tout ce désert -et de tout le Congo-Brazzaville pour ma part- je découvre un autre climat, en plus du panorama qui m’entoure.

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Certaine partie de la montée sont trop sableuse pour être pédalée, d’autre suffisamment pour raide pour m’obliger à devoir pousser mon Cargo.

Les nuages reprennent immédiatement leurs places,juste au-dessus de ma tête comme de coutume depuis mon arrivée au Congo-Brazzaville. La vie humaine refait son apparition et de nouveaux villages accompagnent mon chemin les uns après les autres. Et comme bien souvent depuis mon arrivé dans ce pays je les traverses à travers les   » « bonjour Papa « ,  » ça va ?  » et autre signe de bienveillance qui donnent à ces villages isolés, sans éléctricite ni richesse, presque oublié du monde « moderne », quelque chose de fort et touchant, une simplicité matérielle qui offre une richesse, tout autre, aux rapports humains si particulier de cette partie du monde où chaque soir, dormant chez l’habitant, je découvre l’hospitalité des locaux. L’hospitalité de ceux qui n’ont rien, ou presque, mais qui donne tout.

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en arrivant au sommet de cette dernière colline, la plus longue et dure de tout ce désert -et de tout le Congo-Brazzaville pour ma part- je découvre un autre climat, en plus du panorama qui m’entoure.

Alors que le pays semble tourner au ralenti, l’hospitalité me semble fonctionner en accéléré. Pas un soir sans lit, pas un soir sans eau pour me laver. Pas plus de 5 minutes pour trouver ou me loger.

Les quelques scènes surréaliste passée dans des commissariat de police corrompu n’y changeront rien. Le compliqué de la bureaucratie n’enlève rien à la facilité que m’offre les villageois.

Ni à la beauté naturelle de ces régions éloignées des grands centre et ports commerciaux.

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a beauté naturelle de ces régions éloignées des grands centre et ports commerciaux.

Direction Brazzaville

Le lendemain et avec plus 900 km de pistes au Congo-Brazzaville, je retrouve  le goudron. Avec un certain plaisir, bien que ces dernières semaines de pistes furent magnifique.

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mes derniers km de pistes furent pédalé dans une boue collante, fatiguante

En effet le violent orage d’hier soir avait laissé des traces et mes derniers km de pistes furent pédalé dans une boue collante, fatiguante, à laquelle sont venus s’installer les « fueros ». Des petits moustiques difficilement visible qui viennent littéralement te sucer, laissant parfois de bien pénibles démangeaison sur les jambes, les bras et tout ce qu’ils ont pu piquer. Avec l’humidité de ce matin, impossible d’y échapper. J’en ai gagné quelques trace de sang sur le bas des jambes. Au moins ils ne transmettent pas la malaria. C’est déjà ça.

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les « fueros ». Des petits moustiques difficilement visible qui viennent littéralement te sucer

La suite, jusqu’à Brazzaville, consistera en une route goudronnée et généralement plate, entrecoupée, tous les 100 km à peine, d’une longues descentes de plusieurs km offrant la encore de belles vues, puis, de l’autre côté de la rivière, une montée semblable. Avant de reprendre un chemin plus plat et ennuyant, heureusement accueillant que seul quelques orages et « nid de poulets » viennent pértuber de temps en temps.

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Un « nid de poulets » comme on dit ici. Heureusement il n’y en avait pas beaucoup des comme ça.

Mais encore

Cette route aussi spectaculaire qu’inatendue aura donc été une belle découverte, surprenante et inoubliable. Pour la situer géographiquement, elle se trouve entre Zanaga et Djambala, deux villes séparées de 180 km.

10 km au sud de Zanaga, en direction de Brazzaville se trouve un village nommé Ingoumina. Ici il faut prendre sur la gauche et Oubiti, situé  10-15  km après Ingoumina. C’est là qu’il faudra se ravitailler en eau puisqu’ensuite il n’y a rien jusqu’à Kébara, 105 km plus loin. Quelques km après Oubiti il faut prendre sur la gauche (ne pas suivre Kimba-Kindamba), ensuite il n’y a plus de carrefour jusqu’à Kébara.

Si vous voyager à vélo il faut prévoir suffisamment d’eau (une dizaine, un peu moins si pous pensez le faire en un jour) parce que la route n’est pas si facile, avec des collines incessantes. Quelques part ne sont pas roulable à vélo car trop sableux, bien qu’ils sont rares. Il faut aussi généralemen plus chaud que dans la forêt équatoriale et il est très difficile de trouver de l’ombre. Fait non négligeable à vélo.

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Cette route aussi spectaculaire qu’inatendue aura donc été une belle découverte, surprenante et inoubliable.

SI vous décidez de passer une (ou plusieur) nuit là-bas -je vous le conseille- vous aurez droit à l’appaisante solitude de la région. Le bruit des grillons, des oiseaux, pour principal compagnon.

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Le bruit des grillons, des oiseaux, pour principal compagnon.

Quelques photos en vrac

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Olivier Rochat

Pas de Gabon, mais un nouveau compagnon

Km 34’348, Mossendjo, Congo-Brazzaville.

Toujours à la découverte du Congo-Brazzaville, j’ai passé 10 jours avec Pedro, un cycliste espagnol qui, comme moi, fait un tour d’Afrique à vélo et dans le sens des aiguilles d’une montre. Nous nous étions précedemment rencontré à Windhoek, en Namibie, mais cette fois c’est à Mbinda, un gros village à 7 km du Gabon, que nous nous sommes retrouvé, près de 3  mois après notre première rencontre. La frontière étant toujours fermée depuis les élections de fin août, nous avons décidé de revenir sur nos pas. En direction de Brazzaville pour y faire nos visas pour le Cameroun.

Voici quelques photos et mes impressions, écrites sur la route et mises en page aujourd’hui, sur le fait de retrouver un compagnon de route pour plusieurs jours après plus de 15 mois  d’itinérance solitaire.

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J’ai passé 10 jours avec Pedro, un cycliste espagnol qui, comme moi, fait un tour d’Afrique à vélo

* « Nous nous sommes disparus
Comme un marin qui prend les nues
Pour l’océan …
Et qui s’enfonce au fond de l’eau
L’amour emporté par les flots
Les flots du temps…
Nous aurions pu nous unir mieux
Comme on dit « s’unir devant Dieu « 
La mascarade …
Non moi ne m’a jamais tenté
Oui que la sincère amitié
Des camarades » 

Sauvage, souriante et authentique, l’aventure continue au Congo-Brazzaville.

En effet en rejoignant la frontière gabonaise entre Mbinda (Congo-Brazzaville) et Moanda (Gabon), je me retrouve face à l’impossibilité de rentrer au Gabon. Suites aux élections de fin août les frontières ont été fermée. Pourtant à l’ambassade du Gabon à Brazzaville, où j’ai obtenu mon visa, on m’avait dit -et certifié- qu’elles étaient déjà ouvertes, alors que ce n’était visiblement toujours pas le cas 5 semaines après les élections.

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En jouant avec les enfants durant l’attente à Mbinda

Après 3 journées d’attente et de repos, nous reprenons la route en sens inverse. Nous revenons donc sur nos pas.

Oui je dis « nous » puisqu’à défaut de Gabon, j’ai gagné un nouveau compagnon. C’est dorénavant avec Pedro que je continue ma route en Afrique.

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C’est dorénavant avec Pedro que je continue ma route en Afrique.

Pedro c’est un voyageur espagnol qui est parti de Madrid 3 mois avant mois avec une idée sensiblement similaire à la mienne : un Tour d’Afrique à vélo et dans le sens des aiguilles d’une montre. Et sans date de retour. Il était donc normal que nous nous rencontrions et cela aurait pu se faire bien plus tôt, même s’îl en fut autrement.

Pour comprendre notre histoire commune, remontons donc un peu le temps :

Novembre 2014 : Pedro entre en Afrique quelques jours avant moi. Nous n’avons alors aucune connaissance l’un envers l’autre.   

                                                                                 

Janvier 2015 : Lorsque j’entre au Soudan, le 21 janvier 2015, je ne sais pas encore que Pedro y es entré 5 jours auparavant. Un mois plus tard, j’entre en Ethiopie. Sur la route, le jour précédent mon entrée en Ethiopie, je dors dans le village de Doka, quelques dizaines de kilomètres avant la frontière. Il s’agit là de ma dernière nuit au Soudan. Dans le village on me dit que deux cyclistes me précèdent d’un jour. L’un deux est Pedro. Mais sans moyen de se contacter, nos chemins s’éloignent. Pedro pédale avec Niguel, un voyageur néo-zélandais que j’avais rencontré brièvement à Aswan. Les deux cyclistent décident de partir au nord de l’Ethiopie, ou peu de cyclistes se rendent. Je décide de passer par le centre du pays, pensant les rattraper à Addis Abeba. Je rejoindrai Addis Abeba bien avant eux.

Mars 2015: 5 semaines après y être entré, je quitte l’Ethiopie, partagé entre le pire et le meilleur, alors que Pedro y restera 5 semaines de plus.

Avril 2016: Notre histoire aurait bien pu s’arrêter là mais 13 mois plus tard, alors que je suis accueilli par Grant à Lady Grey (Afrique du Sud) de la communauté Warmshowers, je revient sur les traces de Pedro que Grant à également accueilli 1 mois plus tôt. Il me dit que Pedro effectue lui aussi un Tour d’Afrique (je l’ignorais à l’époque) et ne compte pas s’arrêter au Cap comme la plupart des voyageurs cyclistes le font. Il est, à ce moment du voyage comme aujourd’hui encore, le seul voyageur que je connais étant en train de remonter du Cap au Maroc à vélo, dans les mêmes dates (environs), que moi. Il y en a peut-être d’autres, mais c’est là la meilleure occasion – et peut-être bien la seul?- d’avoir un compagnon de route ces prochains mois.

Juin 2016: Mon visa sud-africain terminé, je quitte le pays en bus, du Cap jusqu’à la frontière namibienne, rattrapant un peu de mon retard sur Pedro. Après quelques hasards, finalement c’est à Windhoek, capitale de la Namibie, que je rencontre enfin Pedro. Cette fois nous comptons bien continuer ensemble, en direction de l’Afrique centrale. Mais la bien mystérieuse administration angolaise en décidera autrement. Sans visa, je suis obligé de contourner l’Angola alors que Pedro a, lui, eu son visa. Mais le rythme de route de l’un et les tentatives répétitives et avortées de l’autre -pour obtenir le visa angolais- finiront par nous permettre de nous retrouver au Congo-Brazzaville, à 7 km de la frontière gabonaise qui ne nous laissera pas passer.

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C’est à 7 km de la frontière gabonaise que nous effectuons nos premiers km ensemble

Nous revenons sur nos pas

Me voici maintenant avec un nouveau compagnon de route, pour la première fois depuis plus de 15 mois et la venue de mon frère pour m’accompagner durant 3 semaines en Tanzanie. Tous les cyclistes voyageurs ne recherchent pas la même chose et pour ma part, entrer en Afrique seul m’a permis, ou obligé, de devoir faire des efforts d’intégration. De devoir aller vers les autres, sans avoir personne sur qui compter, ou pour faire le travail à ma place. Si je veux parler à quelqu’un, ce sera avec les locaux. En étant accompagné, comme je l’avais été avec Stephan ou mon frère en 2015, j’ai trouvé que le rapport avec les pays traversé était très différent.  Sans s’en rendre compte, on peut rester plus distant des populations locales (ce ne sera bien sûr pas toujours le cas) en passant l’entier de nos discussions avec no(tre)s partenaire(s). Voyager à plusieurs à ses avantages et désavantages, de même que voyager seul.

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Les collines incessantes dans la forêt tropicale

Mais en choisissant de partir seul, bien conscient que je ne rencontrerais pas des milliers de voyageurs -et si tel était le cas rien n’indiquait que nous nous entendrions suffisamment bien pour passer plus de quelques jours ensemble- je savais que je passerai beaucoup de temps avec moi-même. Durant ce voyage et bien qu’en Afrique nous ne sommes finalement jamais seul, les nuits tombent relativement tôt durant toute l’année (entre 17h et 19h pour ma part), obligeant à trouver un endroit pour dormir. Lorsque je dors dans le bush, il m’arrive d’avoir fini ma toilette, ma cuisine, vers les 19 heures, peut-être même avant. Sans électricité, dans la nuit, il me reste plus de 10 heures a passé, à attendre. Réfléchir. Dormir.

Pédaler seul c’est aussi une manière d’avancer à laquelle je suis habitué depuis longtemps, et à laquelle j’ai du, petit à petit, me réhabituer dans ce voyage.  Pédaler sur son temps libre n’a pas grand chose en commun avec voyager pour plusieurs années à vélo. Si l’un sera plus une évasion, un changement au quotidien souvent blasant de notre existence, l’autre devient, au fil du temps, un nouveau  mode vie. Au contraire de l’évasion, ou encore de l’oubli de mes problèmes le temps d’une sortie à vélo, ce voyage est pour moi l’occasion de me retrouver. De me découvrir d’une manière beaucoup plus forte et honnête que je ne l’ai jamais faite auparavant, et que peut-être je ne ferai plus. Mes problèmes n’ont pas été fui, ils ont été affronté. J’ai du les comprendre, comprendre leur source si besoin, puis petit à petit ils ont disparu, laissant place à une réalité bien plus simple. Celle du quotidien du voyageur cycliste qui me permet de revenir à l’essentiel. M’alimenter. Dormir. Me laver. Sourire, aimer. Se distraire. Vivre.

Un problème? Ah bon…

Et si certains peuvent naturellement penser que voyager c’est un peu une manière de se déresponsabiliser -de mes « devoirs sociaux » par exemple-, il en fut tout le contraire. Car avant de vouloir créer une famille ou changer le monde et se responsabiliser vis à vis de ces tâches, il est bien de se responsabiliser vis à vis de soi-même.  De s’aimer soi-même avant de chercher à en aimer un/e autre. L’amour nous appartient. Pas notre partenaire.

* « Pauvres de leur cupidité
sont ceux qui s’échinent à garder
L’autre pour soi ..
Au diable les rêveurs qui
Ne tenant pas debout se lient
Les coeurs en croix
Au diable leur stupidité
Car même à deux nous ne sommes faits
Ouais que de soi…
Sûr que de soi … »

J’aime parfois dire qu’en effectuant un seul Tour d’Afrique, des « tours de moi-même » j’en ai fait des dizaines. En fait en moins de 6 mois, sans même chercher à le faire, le travail « thérapeutique » qui s’est opéré régulièrement dès le premier jour de mon voyage – et même dès que j’ai mis une date sur mon jour de départ, 6 mois avant ce dernier- a été bien plus grand que n’aurait même pu l’espérer un psy sur 6 ans de thérapie. Au fil du temps  j’ai trouvé réponse à mes questions, à mes soi-disant problèmes, pour la plupart imaginaires comme le sont la plupart des vôtres,  et ces derniers mois j’ai souvent eu l’impression d’avoir trouvé une nouvelle vision du monde, et surtout de moi-même, de mon existence. Une vision plus simple et légère. En simplifiant le matériel qui m’entoure,  j’ai aussi enrichi le spirituel qui m’habite. Qui nous habite tous. La plupart de mes journées sont simples. Mais elles comblent bien plus que mes besoins. Ces derniers ont diminué. Au final une certaine tristesse, mélancolie avec laquelle je suis né, j’ai grandi, s’en est comme allée. Remplacée par autre chose, comme un bonheur qui est juste là. Partout, toujours. Le bonheur d’être et d’exister. Peut-être aidé par la confiance en soit.

Beaucoup d’amis cyclistes, lorsqu’ils me font part de leur expérience de voyageur, m’expliquent avoir traversé une phase de haut, au début de leur voyage, puis des phases plus basses, enfin plus hautes.  Ce ne fut pas le cas pour moi. J’ai traversé ce voyage, que je traverse encore d’ailleurs, comme si j’étais parti du fond de l’océan, coincé dans les profondeurs avec un boulet accroché au pied. Gentiment mais sûrement, sans vraiment m’en rendre compte, j’ai trouvé le moyen de me délester du boulet qui me coinçait dans les profondeurs. Alors j’ai commencé à remonter, petit à petit, jusqu’à retrouver la surface de l’eau. Emporté par le vent, l’élan, à un moment donné j’aurai pu m’envoler, mais sachant que ne sachant pas voler je retomberait durement à la surface de l’eau, comme souvent par le passé, je suis resté à la surface, me laissant emporté par le courant de l’eau. Parfois fort, parfois doux. Rencontrant de temps à autres d’autres courants, parfois tumultueux, parfois franchement ennuyant, et acceptant un certain ennui à d’autres instants. Laissant passer les tempêtes. Apprenant, dans les faits, à m’adapter au courant de l’eau. Sans chercher ni à m’envoler, ni à faire de la plongée sous-marine.

Comme une montée timide mais incessante, qui se stabilise, enfin, dans un environnement qui est le sien. Sans addiction ni émotion exagérée.

Aujourd’hui mes problèmes d’hier, ceux qui peuplaient mon quotidien au début de mon voyage, ont disparu. Comme happé par le temps que j’ai su apprécier. Que chaque jour j’apprends à aimer. Le temps n’est pas mon ennemi, malgré ce qu’on nous apprend dans nos écoles. Mais à ce stade de mon existence physique, c’est à travers lui que je vis, que je vois. Que je ressens et que j’évolue. Le temps occupe chaque particule de mon existence et je dois faire avec. Physiquement je n’ai de solution.  Spirituellement je m’aime ainsi. Ne pas l’aimer équivaudrai à ne pas m’aimer. Etre son ennemi équivaudrai à être mon propre ennemi. Aujourd’hui, le temps, je le prend par la main.

J’apprend à apprecier le courant de l’eau. Car l’eau, c’est la vie.

 

J’ai parfois eu le sentiment d’avoir touché le bonheur

Un bonheur léger comme celui des enfants, mais qui se doit de rester vigilant car loin des parents. Un bonheur sans stress ni attente particulière. Le bonheur de revenir à l’essentiel et de prendre le surplus comme un cadeau, un petit plus. Celui d’avoir de l’électricité de 18 h à 22 heures lorsque nous passons la nuit -avec Pedro- dans une mission. Celui de regarder les match de foot le dimanche après-midi au cinéma du village et pleins d’autres encore qui font qu’être heureux, au fond, c’est très simple. C’est peut-être là qu’il se cache le bonheur. Dans la simplicité. Dans l’authenticité. Peut-être ne faut-il pas le chercher, plutôt le laisser s’exprimer, exister.

Et  surtout ne pas le rechercher. Il ne se cache pas.

Mais en découvrant le Congo-Brazzaville, je me suis aussi aperçu qu’une certaine fatigue s’était installée dans mon quotidien. Pas celle des jambes mais celle d’être, sans arrêt, un blanc parmi les noirs. Un différent qui ne laisse personne indifférent. Avec les avantages et les inconvénients que ça comporte. Car voyager en Afrique, opinion personnel, demande une certaine énergie, majoritairement dans les rapports humains. Une énergie journalière, répétitive. En voyageant comme je le fais j’ai la chance de découvrir une Afrique que tout le monde n’a pas l’occasion de connaître, au rythme de mon vélo. Et la simplicité que ce dernier m’apporte, autant spirituellement que matériellement. Mais bien qu’aujourd’hui je me rende compte que l’Afrique va terriblement me manquer le jour où je vais la quitter, je me dois d’admettre que l’égalité y est utopique. Je suis toujours un blanc. Un blanc à vélo, un blanc comme çi ou comme ça, que l’on aime ou que l’on n’aime pas. Mais un blanc avant tout. Un Mundélé, un Mzungu, un Farenji. Et si un jour j’ai besoin de parler, je n’ai personne.

En tant que blanc, ici je représente l’argent à tel point que certains africains, bien mieux lotis financièrement que moi, vont me voir comme une chance d’accéder à la richesse. J’ai parfois l’impression que l’un des plus gros problèmes de l’Afrique c’est qu’aujourd’hui elle ne croit pas en elle. Son potentiel, pourtant, est gigantesque. Bien sûr, personne n’a jamais vraiment joué le jeu avec l’Afrique. Mais aujourd’hui le complexe d’infériorité -par rapport aux blancs-, inconscient, qui habite bon nombre d’africain, est effrayant. J’ai rencontré beaucoup d’africain qui n’étaient pas pauvres (matériellement parlant) mais qui croyaient l’être. Un congolais (de RDC) m’avait dit en Zambie:

« Dieu nous a donné la richesse les terres les plus riches-, mais l’intelligencel’exploitation de cette richesse-, il l’a donnée aux blancs ». 

Avant d’ajouter que l’indépendance du pays, acquise en 1960, était venue beaucoup trop tôt. Alors que cette dernière est venue après plus de 4 siècles de l’un des génocides les plus inhumains -l’escalavage- qui a littérallement sucé l’Afrique de tout dévelopement positif –.naturel et culturel-  et 1 siècles de colonie prônant la haine et le classement des races, mettant les « races d’Afrique » entre l’animal et la « simple » infériorité, dans le meilleur des cas.  Soit beaucoup trop tard.

Alors que ce « classement » a perduré jusque dans les années ’90 (oui j’étais déjà né) en Afrique du Sud avec l’apartheid que certains (j’en ai rencontré) défendent encore.

Un « classement » qui perdure encore dans bon nombre de conscience (médiatique, politique…), lorsqu’il ne s’agit pas d’inconscience (le noir est un migrant, le blanc un expatrié).

En retrouvant Pedro je retrouve donc un blanc comme moi, voyageur qui plus est. Plus âgé aussi, et donc certainement plus expérimenté. Mais je retrouve surtout une épaule sur laquelle me reposer, et cette impression de facilité, celle où tout va bien se passer. Et quelqu’un à qui parler, avec qui partager. Car si le bonheur est d’exister, autant le partager.

* « Mon amour j’ai pas su tenir
Les promesses du devenir
Un avec toi
J’ai plus que moi-même à qui dire
Qu’il est triste mon triste empire
Qu’il est triste sans toi
Quel océan vers quel abîme
Dis-moi où mène ce chemin
Où tu n’es pas ?
Car si l’on ne meurt pas d’amour
Je peux te dire qu’il est certain
Qu’on meurt de toi

Qu’on meurt de toi … »
*= parole de la chanson « On meurt de toi », de Damien Saez
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Olivier Rochat
 

 

 

 

 

 

La Sardine d’Or

Km 34’170, Mayoko, Congo-Brazzaville.

Après mes premières journées à la découverte du Congo-Brazzaville, je suis entré dans la forêt tropicale. Un chemin beau, parfois spectaculaire mais souvent difficile qui me voit grimper collines les unes après les autres sur des pistes toujours roulables et poussiéreuse, mais très bosselée. Un chemin particulier, ou se mélange constamment pauvreté et richesse.

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La région est relativement isolée a cause de l’état des routes. Trouver de l’électricité n’est pas gagné d’avance, un simple restaurant local non plus. En effet je traverse parfois des dizaines de villages sans trouver une seule fois de l’électricité, ni même de quoi me ravitailler. Pas un seul petit restaurant, pas un fruit. Seul semble survivre quelques bars vendant majoritairement des bières chaudes et quelques sodas isolés sur les étagères.

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La région est relativement isolée a cause de l’état des routes.

 

 

Pourtant les gens restent majoritairement souriant et accueillant et parfois la traversée d’un village ressemble presque à une compétition de bonjours. Devant chaque maison on me salue « Bonjour Papa », « tu vas où « , « ça va ? » auquel je répond par un salut à mon tour.

Parfois un « c’est un touriste  » ou « mundele » accompagne les salutations et chaque rencontre demande une certaine énergie, peu semblent rester indifférent à mon passage. En effet je suis un blanc et je représente pour beaucoup la chance de se faire un peu d’argent, et si tel n’est pas le cas, ma présence ici à vélo peut en surprendre plus d’un et dès que je m’arrête les questions fusent.

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Ma présence ici à vélo peut en surprendre plus d’un et dès que je m’arrête les questions fusent.

La bureaucratie est également assez… surprenante et varie d’un village a l’autre. Parfois on me dit qu’il faut que je me fasse enregistrer à chaque village qui possède une police mais lorsque que j’y vais de mon plein gré on me demande pourquoi je demande à m’enregistrer…

 

J’y vois surtout l’occasion de se faire un peu d’argent mais par chance à vélo je n’ai pas besoin de permis,  ce qui n’est pas le cas des automobilistes qui se voient demander des dizaines de permis et autorisation différente. Hier, après m’être fait enregistrer dans un village, je demande au préfet qui m’a enregistré la route pour le marché histoire de me reposer et manger quelque chose. Plus tard, mangeant au marché je croise le préfet qui semble faussement surpris de me retrouver là.

« ah vous êtes là ? » commence til, avant de continuer sur quelques phrases de politesse. Puis d’ajouter: « un jus me ferait le plus grand bien ».

J’esquisse un sourire. « pardon? »

« Je disais qu’un jus me ferait le plus grand bien «  répète til presque vexé que je ne lui ai rien offert. Je le regarde se dandiner sûr de lui dans son beau costume, ses chaussures polies et pointues semblent repousser la poussière qui chaque jour repeint la rue, les étagères branlantes où gîsent quelques poissons qui n’attendent que d’être mangé et les bien trop rustiques maisons de bois -quelques planches ajustée- qui forment la majorité des habitations que je croise. Elles semblent n’avoir qu’une espérance de vie très courte et le quotidien des habitants semblent trancher avec celui de ce préfet bien nourri et qui en redemande.

« les blancs réalisent leurs idées et ensuite ils s’assoient. Ils ne sommes pas comme nous « , répond il au gérant du petit restaurant, où il s’est assis, qui lui demandait ce qu’un blanc à vélo peut bien faire ici.
Après cet instant philosophique, je reprends ma route.

 

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Fufu, poisson et aubergine accompagné d’une bière congolaise « Ngok ». Lorsque je peux m’offrir un petit plat je suis bien content

 

 

« Prend moi avec toi ! » me demande alors une femme qui me regarder partir. Je me demande bien comment elle peut me demander ça en face de 4 petits enfants dont certains sont probablement ces fils.

« mais je n’ai pas de place ! ». Et je n’ai pas envie non plus…

Plus loin un homme m’applaudit et m’offre un grand sourire en me souhaitant bonne route.
Puis quelques « bonjour  » m’accompagne enfin je quitte le village, seul point de ravitaillement aujourd’hui.

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Alors je m’enfonce dans la forêt sur une route est bosselée et les collines incessantes et humides mepuisent.

Alors je m’enfonce dans la forêt sur une route est bosselée et les collines incessantes et humides m’épuisent. Ma transpiration se mélange à la poussière et les motos sont la majorité du faible trafic que je croise. Le reste sont de gros camions remplis d’énormes troncs de bois.
Le bois de la région est exploité par de nombreuses entreprises qui détruisent à grandes échelles la forêt équatoriale, deuxième plus grande forêt vierge du monde et véritable poumons de l’humanité.

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c’est tout un écosystème que l’on tue

En la tuant c’est tout un écosystème que l’on tue. Des milliers d’espèces que l’on extermine dont certaines sont essentiels à notre survie . C’est un suicide lent en quelques sortes.

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C’est un suicide lent en quelques sortes.

Pourtant peut semblent s’en préoccuper et ici ce masse chinois, européen, sud-africain et bien d’autres encore. Creusant pour de l’or ou du diamant, coupant les arbres comme on coupe le foin chez moi, l’argent dicte ses lois. Dicte ses droits.

L’homme en devient son esclave, son sujet. Aussi, cruel, je m’aime parfois à le voir s’y perdre. À le voir construire son propre chemin de croix. L’argent le tueras.

Mais je me préfère à l’ignorer. Et le ventre creux, me nourrir des sourires qui accompagnent mon chemin dont je ne connais la fin. Mais qui passent des déserts les plus arides aux forêts les plus humides. Car si hier les vents des désert chantaient sous mes roues, aujourd’hui les chants infini des oiseaux les ont remplacé.

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Un mille patte de la taille de mon pied me coupe la route.

Ici ce cache des espèces et par milliers.
Un mille patte de la taille de mon pied me coupe la route. Je manque de l’écraser.
Et je continue ainsi, accueilli au soir par le chef du village de Singidi. Il m’offre un lit pour la nuit.

J’en repars sec et reposé, chanceux car cette nuit il a plu. La saison des pluies va sous peu commencer.

J’ai maintenant la forêt pour moi à l’orée du Gabon. Et même si ce n’est pas la première fois, je vois comme l’homme peut être bon.

Le problème c’est qu’il ne le sait pas.

ou alors ne le veut il pas?

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J’ai maintenant la forêt pour moi à l’orée du Gabon.

Paul (1)

Je rencontre alors Paul, un sud-africain qui travaille au Congo-Brazzaville depuis plus de deux ans. Son travail: chercheur d’or. Je l’avais précedemment rencontré à Brazzaville plus d’une semaine auparavant. Se rencontrer ici, dans la jungle sur une route relativement isolée, est assez surprenant. La frontière gabonaise étant toujours fermée suite aux élections, Paul me propose de rester avec lui, à Komono. Je passe ainsi 5 jours avec Paul, généreux, qui m’invitera et me présentera à certains de ces amis.

Il travaille depuis plus de 14 ans dans ce milieu. Son truc à lui, c’est les diamants. Il a commencé au Libéria avant de s’enfuir après s’être rendu compte que son permis de travail n’était pas légal et qu’il travaillait avec une fausse autorisation. Ensuite c’est en Angola et au Congo-Kinshasa qu’il a passé le plus clair de son temps, dans des conditions pas toujours faciles, souvent dangereuse, mais en défendant la légalité de son travail et surtout luttant contre l’utilisation abusive des enfants pour chercher l’or ou le diamant, comme cela se fait encore aujourd’hui, notamment en République Centrafricaine et au Congo-Kinshasa.

Aujourd’hui et depuis 2 ans il travaille au Congo-Brazzaville, pour une compagnie française. Dans cette forêt pourtant les gens vivent avec peu, parfois presque rien. L’agriculture n’a jamais été développée et les grandes compagnies sont misent en avant. Ainsi de nombreuses compagnies chinoises viennent faire leur business ici. Il n’y a ni inégration, ni volonté de le faire. Pourtant le sol est plutôt riche, dans certaines régions on trouve du diamant, et souvent de l’or. Lorsque Paul se rend sur son chantier actuel, dans une région isolée proche du Gabon, il part avec quelques hommes. Ils emportent  avec eux des sardines, des biscuits, de l’essence. Et avant même de commencer à creuser dans la jungle, la boue ou ailleurs, ils échangent ces biens contre ce qu’ils cherchent: de l’or.

Les locaux qui trouvent de l’or, s’ils ne sont pas engagés par une compagnie, ne pourront rien en faire. Et il faut plusieurs grammes pour pouvoir le vendre et en tirer quelque chose. Ainsi il est très facile d’échanger de l’essence, ou même une boîte de sardine, contre une petite pépite d’or. La dernière pépite qu’il a changé pesait 0.2 grammes, avec une valeur de 5’000 CFA (8 euros). La boîte de sardine en retour, n’en valait que 500 (moins de 80 centimes d’euros).

Puis nous allons voir une compagnie française qui vent l’entier de ces machines pour 2 millions d’euros. En effet, ils avaient misé sur le fer, mais le prix du fer a chuté durant l’année et cette compagnie a tout perdu. Maintenant en faillite, elle cherche à revendre ses biens, d’une valeur totale de 2 millions, alors qu’ils en avaient coûté plus de 20 X plus.

Le dernier matin, alors que je déjeune avec Paul, deux hommes arrivent. Ils tiennent une bouteille de verre, à l’intérieur de laquelle se trouve un liquide noireâtre, ressemblant d’aspect au Coca-Cola. Ils nous montrent un papier attestant qu’il s’agit là de Coltan-Uranium, radioactif au touché. Sa valeur est de 4,7 millions de CFA, soit près de 7’500 euros. Ne pouvant prouver sa provenance, les deux hommes s’en iront rapidement, essayant probablement de la vendre quelque part. Pourtant avec cette bouteille sur eux, ils risquent gros, surtout si elle a été volée.

Pendant plusieurs jours je découvre ainsi cette double réalité, celle d’une population pauvre qui vit sur un sol riche. Mais qui ne lui semble pas destiné. Ainsi Paul m’explique le jour ou il a augmenter un de ces travailleurs les plus fidèles, qu’il payait alors environ 150 euros par mois. 150 euros c’est déjà bien plus que la moyenne pour les locaux, ainsi en voulant l’augmenter  la mairie lui a fait comprendre que c’était très mauvais, car ça casse le marché. Une hiérarchie semble installée: En haut on trouve les chinois ou les occidentaux. Puis les philippins et les malaysiens qui travaillent pour eux. Enfin au bas de l’échelle, se trouvent les congolais…Pourtant chez eux.

 

1. Paul=prénom d’emprunt

Olivier Rochat