Km 61’227, Ksar Sghir, Maroc.
Mercredi 4 juillet 2018, j’ai rejoint la méditerranée. Puis, dès le lendemain, le détroit de Gibraltar et mon point final du continent africain: Tanger.
Aujourd’hui, je me repose dans cette même Tanger.
Le départ est imminent, un de ces jours probablement.
Voici un texte écrit à 40 km de Tanger. Peut-être le dernier que je vous partage depuis le continent africain.
Mais pas de crainte on se retrouve de l’autre côté, en Andalousie. Bientôt…
« Aujourd’hui règne comme une odeur de fin sur la côte sud du détroit de Gibraltar.. Mon dernier jour de route sur le continent africain. Après 55’318 kilomètres, les 40 kilomètres qui me sépare de Tanger sont une distance que j’ai parcouru plus de 1’382 fois en Afrique.
Et après 1’310 jours en Afrique, les quelques heures qui me sépare de cette même Tanger formeraient l’équivalent d’une dizaine de secondes par rapport à une journée de 24 heures. Sur une distance de 1’000 kilomètres, à proportion gardée, ces 40 kilomètres ne seraient que 720… mètres.
Des miettes.
Des miettes qui, pourtant, me saisissent l’esprit comme rarement. Sur les bords de la méditerranée je vis là mes derniers instants sur le continent africain. Intense, ils sont les derniers d’une aventure fascinante qui m’a mené aux 4 coins du continent africain. Qui m’a mené, parfois, au bout de moi même. Mais toujours proche des gens. De ces cultures à la fois si rude et accueillante, dont l’ordre et la structure sont bien souvent régie par des logiques qui différent des miennes.
Une Afrique qui m’a longtemps fait rêver. Qui m’a beaucoup testé. Et que j’ai appris, de jour en jour, à aimer. Au point de ne plus vouloir la quitter, la regarder avec le regret de partir et, déjà, l’envie de revenir. Car malgré l’excitation que me procure l’approche des retrouvailles avec les miens, ma culture et mon pays, c’est avec le cœur noué que j’ai sobrement rejoint la méditerranée, hier, avant de me glisser dès aujourd’hui sur les côtes du détroit de Gibraltar. Balayé par le vent comme rarement, sous des bourrasque renversant tables et poubelles, balançant parfois les parasols des plages au milieu d’un sable volant, je m’approche inévitablement de Tanger, mon point de départ du continent africain.
Il me reste quelques heures, une après-midi de route. Quelques côtes en bord de mer. Et le silence de mes pensées qui gigotent puis s’étouffent, qui crient au monde des mots qui n’existent même pas, qui restent coincé là, dans mon esprit silencieux. Dans mes pensées qui s’en vont dans le lointain de cette mer, la méditerranée, où se termine dorénavant mon horizon. Et derrière laquelle se situe mes origines, mon enfance.
Derrière laquelle j’aperçois bientôt les côtes espagnoles qui se dressent comme la terre qu’un marin, en mer depuis 43 mois, aperçois à nouveau. En lui, en moi, ce mélange de joie et d’appréhension, comme si, tu vois, on rentre à la maison.
Mais finalement, à travers ces phrases qui ne sortent pas comme je le voudrais, c’est un sentiment de gratitude qui m’habite, de cette chance d’avoir pu vivre ça, cette reconnaissance envers moi-même de l’avoir choisi, et envers le monde, tout ceux que j’ai croisé, de m’avoir accueilli, de m’avoir partagé. De m’avoir permis. De m’avoir fait Roi malgré mes airs de vagabonds.
De m’avoir offert le toit, ouvert la porte d’une maison.
De m’avoir grandit.
Merci, et à bientôt.
Olivier « Zitouni » Rochat