Km 59’482, Casablanca, Maroc.
Après une longue pause de près de 5 semaines me voici de retour sur la route pour ce qui devrait être mes dernières semaines en Afrique.
En effet après plus de 2 mois au Maroc, partagé entre le Sahara et l’Atlas, déserts et montagnes, je suis retourné quelques temps en Namibie, sans vélo, pour y retrouver mon amoureuse. J’ai également essayé d’obtenir un visa pour l’Algérie. Mais après plusieurs refus catégorique, car les autorités algérienne applique le principe de réciprocité et le visa doit être obtenu dans mon pays de résidence et lui seul, comme c’est le cas pour les algériens souhaitant se rendre en Europe (et plus ou moins tous les africains) je me suis résolu à terminer mon périple africain par la traversée du détroit de Gibraltar et, donc, par le nord du Maroc.
Arrivé à Casablanca, les côtes espagnoles n’étaient plus qu’à 350 kilomètres et, pour la première fois depuis longtemps, je pouvais regarder l’Europe droit dans les yeux (ou presque) et un mélange d’excitation, de nostalgie et d’émotions m’a vite gagné.
Cependant, j’ai décidé de m’octroyer
un dernier détour (encore un) et, plutôt que de filer vers l’Europe, retourner dans l’Atlas marocain une dernière fois, profiter des paysages fabuleux du Maroc et, plus encore, de l’accueil incroyable qui les accompagne. Et puis un autre événement majeur est venu, encore, plus, motiver ces dernières semaines de route en Afrique : le ramadan.
En effet, depuis le 17 mai dernier, le Maroc et les musulmans du monde entier se sont mis au rythme du ramadan. Entre le lever du jour (l’aube) et le coucher du soleil, le pays tout entier se met à jeûner. Seuls les enfants, les malades et quelques exceptions ont alors le droit de manger ou boire durant la journée.
De retour de Namibie quelques jours après le début du ramadan, j’ai décidé de me prêter au jeu : les jours de repos je jeûnerai.
Profitant de l’accueil formidable de Rachid et de sa famille, je me plonge dans le rythme particulier du ramadan. Pour plus d’un mois le pays entier semble tourner au ralenti le jour avant de se réveiller au soir et de vivre pleinement la nuit. Le Maroc veille de nuit, et s’endort au matin.
Si cette année la durée du jeûne est plus courte au Maroc que dans les pays situé plus au nord, elle dure tout de même 16 heures. Ce n’est que peu avant 20 heures que les familles entières se rassemblent pour le F’tor, le repas du soir que l’on prend juste après la prière qui accompagne le coucher du soleil, la 4ème (il y’en a 5). S’il ne fait pas pleinement nuit, le soleil a bel et bien disparu lorsque nous entamons, affamé, le repas. Les rues de Casablanca, pourtant ville la plus peuplée du Maroc (du Maghreb même???), se vide complètement. Les voitures se sont toutes parquées, les boutiques sont fermées et la vie semble s’être arrêtée. Pourtant le Maroc ne dort pas, il mange. Il fête. En famille. Et pour ainsi dire, comme pour symboliser l’Afrique entière derrière ce simple terme : ENSEMBLE.
Mais c’est avec une simple datte que nous cassons le jeûne. Puis c’est d’un verre de jus de fruit « pressés maison » que l’on se désaltère et reprend des forces. Le festin peut alors débuter. Devant moi une table remplie de nourriture, spécialités marocaine. Les crêpes se dégustent avec du miel ou du fromage, lorsque ce n’est les deux à la fois. Des soupes de légumes viennent remplir le ventre en prenant le relais de petits « sandwichs » en tout genre, garni de kefta (sorte de viande hachées), de fromages, de légumes alors qu’un bol d’huile d’olive, si important au Maroc, accompagne presque chaque repas. Le tout, bien sûr, toujours accompagné de multiples thés. Dehors, les cafetiers et restaurateurs offrent un repas au plus démunis et, bien vite, les boutiques vont se réouvrir, les cafés se remplir et beaucoup vont vivre cette nuit dans son entièreté.
Ce n’est que vers trois heures que nous nous rassemblons à nouveau afin de prendre des forces pour la journée qui s’annonce. Vers 3h30, alors que les toutes premières lueurs du jour s’apprête à apparaître au fond de l’horizon, alors que l’aube pointe le bout de son nez, l’appel à la prière retentit. Beaucoup vont prier, je m’en vais dormir. Pour tous, une nouvelle journée de jeûne débute.
Olivier Rochat