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Yovo cadeaux!

Km 43’429, Kara, Togo.

Voici un texte écrit en transition entre le nord et le sud du Togo,  le 28 mai 2017.

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Le sud du Togo, très verdoyant

« Gentiment Mais sûrement, me voici au nord du Togo. À mesure que je monte au nord, le soleil prend plus de place, les températures augmentent, la pluie se fait de plus en plus rare. L’aridité prenant son aise, de plus en plus, c’est en direction du sahel, en prévision du Sahara, que je me dirige.

Cacao

L’exotisme des plateaux de Danyi

À mi-chemin entre l’exotisme des plateaux de Danyi de la semaine dernière, fantastique petit paradis perdu, et le sahel de demain, je découvre non sans plaisir cette partie agréable du Togo, malgré les 38 degré enregistré cet après-midi.

Les plateaux de Danyi de la semaine dernière, fantastique petit paradis perdu

Agréable oui car l’humidité, elle, semble reculer, laissant place à un air plus sec et, paradoxalement à la vue de ses températures, plus agréable. Agréable encore car hier, sur les plateaux de Danyi, ce sont mélangé deux réalité qui ont souvent côtoyé mes routes africaines.

Vue panoramique en grimpant sur les plateaux de Danyi

Aux paysages magnifiques, goût personnel, se mélange en effet bien souvent le tourisme. Tourisme Relatif si on le compare à celui d’une station de ski alpine où d’une plage méditerranéenne, mais pourtant en cette région, en ressort un rapport avec les locaux très, très désagréable. Celui d’une mendicité exacerbée et d’une mentalité… Comment dire ? La mentalité de toute une population, homme ou femme, du vieux à l’enfant, à voir en chaque blanc apparaître un billet de 100 dollars, probablement plus, qui a eu le malheur de prendre pour apparence l’humain. Un humain blanc. Ainsi chaque traversée de villages ou presque , au bon souvenir de ma chère Éthiopie, se transforme presque en course pour fuir l’assaut des plus jeunes lancés à mes trousses s’écriant, aux encouragements de leurs parents, « Yovo Cadeau Yovo Cadeau « .

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Yovo cadeau, Yovo cadeau

Yovo au sud du Togo notamment, c’est le blanc. Tel que jetais un mzungu au Malawi, un farenji en Éthiopie, un mundele au Congo, un White man au Nigeria ou un mulungu au Lesotho, dans toute la partie sud du Togo j’étais le Yovo. Terme raciale j’en convient, auquel je réponds parfois, un peu énervé, par un « bonjour ameybo », ameybo signifiant « noir », de la même manière que Yovo signifie blanc par ici. Lequel a le don de surprendre les locaux, jamais en panne de sourire, provoquant parfois un court fou rire. Oui en Afrique c’est bien connu on s’exprime encore ainsi, criant bien souvent , certes pas méchamment, derrière chaque blanc qui passe le terme qui en rappelle sa couleur de peau. On parle là surtout d’une manière de s’exprimer plus que de racisme. Car au soir, bien souvent, on m’offrira gîte et le repas. Oui. Mais ici, sur les plateaux de danyi les sympathique, bien que rappelant les terribles colonies, « Yovo Bonsoir Yovo bonsoir, ça va très bien me’ci » qu’on me lançait auparavant ont laissé place à ces insupportable Yovo Yovo cadeaux lancés par ces gosses qui me courent après comme un chasseur chassant sa bête. Et lorsque les adultes confirment le mouvement, il ne me reste, malheureusement, plus qu’à passer mon chemin. Laissant derrière moi cette magnifique région, ce paradis perdu au goût d’enfer retrouvé.

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Un paradis perdu

J’exagère certes mais humainement c’est malheureux, tant cette région est belle. Certainement la plus belle que j’aie découverte en Afrique de l’ouest. Et mon constat est quasiment toujours le même en Afrique: plus une région est touristique ou habitée par des blancs venu en aide au noir, plus il m’est difficile de nouer contact avec les locaux.

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Un paradis perdu disais-je…

.Ce fut le cas en Éthiopie où l’aide humanitaire est certainement aussi monstrueuse que l’accueil est compliqué, mais ce fut le cas en pays massai, sur l’île malawite de likoma, touristique et peu accueillante en comparaison de sa voisine de chizumulu, isolée, abandonnée des guides touristique autant que resplendissaient les sourires des locaux. Et ce fut le cas en bien d’autres occasions, des pyramides de gizeh au himbas de Purros, sans oublier cette fracassante réalité de la misère de certains villages isolés congolais qui se battaient presque pour me dire bonjour et m’indiquer le chemin alors que dans les villages voisin, qui ne souffraient d’aucun mal de plus mais se situaient dans un parc national où viennent régulièrement les touristes, les gamins me couraient après en me demandant directement 5’000 cfa sans raison. Inimaginable quand on sait que les gosses des villages alentours se seraient contente d’en toucher 100 après avoir rendu un service. Il s’agit d’un constat plus que d’une accusation quelconque ou envers qui que ce soit. Je suis moi même un touriste, j’en conviens. Et peut être une question en suspend : une aide est-elle toujours bonne lorsqu’elle transforme à ce point les rapports humains ? Bien qu’épuisé, mentalement, par près de 40’000 km sur les routes africaines, j’aime toujours autant l’Afrique. Peut être même de plus en plus. Ce caméléon est venu me le rappeler. Involontairement. Comme sont venus ces villages magnifiques, maisons de terres au toit de pailles, et accueillant. Ces rapports humains dans ce village où debutaient le ramadan. Puis cette nuit en plantant ma tente sur la terrasse d’un bar. Des rapports plus normaux, plus humains. À l’abri des paradis perdu. Où soudain la simplicité refait surface. Les paysages et autres exploitation touristique y perdent de l’attrait. Le voyage n’en est que plus agréable. L’Afrique est un poème. Et parfois, je me demande à quoi tout ça rime ? C’est comme te dire je t’aime et puis me jeter dans l’abîme…

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J’aime toujours autant l’Afrique et ce caméléon est venu me le rappeler.

Olivier Rochat