Queen Elizabeth et la forêt impénétrable de Bwindi

Km 14’076, Kabale, Ouganda.

Au centre de l’Afrique

Me voici maintenant à quelques kilomètres du Rwanda, dans la ville montagneuse de Kabale. Ce matin il pleuvine, il fait frais et le brouillard se faufile entre les vastes collines qui entourent Kabale. Heureusement j’ai retrouvé l’asphalte après 200 km de pistes inoubliables. Dans un premier temps à travers le Queen Elizabeth National Park, puis enfin à travers l’incroyable forêt impénétrable de Bwindi. Là, grimpant jusqu’à une altitude maximale de 2’600 mètres, je me suis faufilé à travers une épaisse forêt,presque jungle, où vit une faune incroyable et notamment les gorilles.

 

Dans une nature intacte, des paysages fabuleux, j’aurai pu voir des éléphants, des babouins ainsi que d’autres singes, des caméléons, un gros varan ou encore d’énorme buffles tout en pédalant avec le son inégalable de cette faune qui rugit, chante et bruisse sur les bords de route. Le Queen Elizabeth Natonal Park, la forêt impénétrable de Bwindi, Pour moi ces deux journées furent les plus merveilleuses et incroyables a ce stade de ce voyage…

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la forêt impénétrable de Bwindi

 

Jour 219, aux portes du Congo

Situé à l’ouest de l’Ouganda, le Queen Elizabeth National Park est en frontière avec l’énorme Congo (ex-Zaïre) et les montagnes de Virunga. Le Congo c’est un pays magnifique mais également un pays qui traverse un génocide, piller, écrasé par les armées ougandaise et rwandaise financée et armée par l’occident (mais à qui profite ces crimes?). En traversant ce parc national je m’approche donc de ce pays gigantesque, de ce drame de plusieurs millions de morts, innocents, qui dure depuis près de 20 ans, ce drame qui se déroule maintenant à quelques kilomètres de moi, pourtant je découvre à quelques kilomètres de tout ça, le plus tranquille, le plus magique et je voudrais dire: le plus réconfortant. Le Queen Elizabeth National Park!

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Situé à l’ouest de l’Ouganda, le Queen Elizabeth National Park est en frontière avec l’énorme Congo (ex-Zaïre)

 

Si je devais ne garder qu’un seul jour, qu’un seul instant, un seul présent, peut être choisirais-je celui ci, aujourd’hui (21 avril 2015), le 219ème jour de route.

Oui aujourd’hui le 219eme jour de route, disais-je. De Lausanne au Queen Elizabeth National Park,  de la porte de mon père aux portes d’un génocide… . Mais le 219éme jour de mon voyage appartient au sommet de la beauté, au sommet de l’art que l’on peut regarder…

A travers le Queen Elizabeth National Park, un instant de 100 km

Magnifique! Inoubliable! Les pistes du Queen Elizabeth National Park… un présent de 100km inoubliable durant lesquelles, inarrêtable, j’ai cru que j’étais en train de filmer… mais pas de film, a peine une rime… Quelques éléphants de temps en temps qui me coupent la route, et d’un râle rauque s’en vont derrière ces gros buissons. Tant pis pour la photo…

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Magnifique! Inoubliable! Les pistes du Queen Elizabeth National Park..

 

4 buffles qui pour la rime s’appellerons Buffalo… dans l’eau, crasse, basse, ils s’enfuiront en me voyant.

J’ai pas vu de lions, pas vu de serpents. Pourtant le félin comme le reptile étaient bien là, quelque part, agile, féroce, à m’observer, à attendre que trop précoce, je m’égare et sans crier gare, sans pitié se nourrir de mon âme égarée, rêveuse, émerveillée, heureuse, presque illuminée…

Une trace de sang dans la savane…

Mais sérieux bien qu’heureux je me suis pas égaré. D’où cet écrit.

Cela sera sans sang.

 

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4 buffles qui pour la rime s’appellerons Buffalo… dans l’eau, crasse, basse, ils s’enfuiront en me voyant.

 

Alors vint le Varan, un gros, énorme, qui déplia sa langue noire et fourchue en me voyant. Il s’enfila dans les épais buissons…

Tant mieux pour moi…

Enfin vint le soleil, bien caché jusqu’alors entre deux nuages. Il surprit les babouins qui s’ensoleillaient au milieu de la route. Pas moi. J’avais mis ma casquette quand passa cette jeep remplie de touristes trop nourri et trop aigri pour être d’ici. Dommage…

Pour ne pas salir plus longtemps pareil paysages, entre les Lacs « Albert » et « George », il me restait à fuir. Enfin je sortis du tableau et repris goût à la vie, goût à l’Afrique.

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entre les Lacs « Albert » et « George »

 

Un pauvre village au milieu de rien. Au milieu des montagnes. Au centre des sourires, une petite place dans mon coeur trop solitaire pour être plein. Le Rwanda n’est plus si loin. Le village entier m’observe. Comme un étranger.

Normal j’en suis un d’étranger. Rien d’autre qu’un étranger. L’instant est connu. Je m’appelle alors Mzungu. Ce terme mainte fois répété par les gamins qui m’appercoivent. Mzungu, un terme qui me suit depuis le Kenya et qui sans le savoir a cet instant la, me suivra plusieurs mois encore.

 

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Un pauvre village au milieu de rien. Au milieu des montagnes. Au centre des sourires, une petite place dans mon coeur trop solitaire pour être plein. Le Rwanda n’est plus si loin. Le village entier m’observe. Comme un étranger.

 

Heureusement l’Afrique d’ici est aussi généreuse. Autant pour les yeux que pour le coeur.

Je quitte le Parc National. L’instant part et si je devais n’en garder qu’un…je garderais celui ci.

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Je quitte le Parc National. l’instant part et si je devais n’en garder qu’un…je garderais celui ci.

 

Cela dit j’en garde plus qu’un, quelques milliers en fait et mieux que tout, j’attends déjà le prochain. L’instant prochain sans oublier celui qui occupe mon présent tout en pensant à demain.

Les pistes ne sont pas terminées. Y va falloir grimper. Grimper à travers la forêt impénétrable du Parc National de Bwindi… Là où les gorilles vivent encore, et c’est ça le plus beau, en liberté…

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Là où les gorilles vivent encore, et c’est ça le plus beau, en liberté…

 

Finalement je passerai la nuit dans une… église. En effet à la sortie du Parc National il m’était impossible de trouver un endroit calme pour passer la nuit. Alors c’est en demandant de l’aide aux villageois qu’ils me feront dormir dans cette église. Et encore une fois j’ai découvert l’hospitalité ougandaise. Ce ne fût pas luxueux mais bien appréciable, au sec et surtout à l’abri de tout ennui.

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En repartant au petit matin je m’attendais à du dur, mais pas à ce point. Tout de collines et de forêts. De boues et de cailloux, à travers l’épaisse forêt de Bwindi, dite « impénétrable », j’ai beaucoup grimpé. J’ai beaucoup transpiré. Pour remonter à plus de 2’500 mètres d’altitude. Le ciel couvert a fini par s’éclaircir mais avant cela j’ai du me battre. La pauvreté des habitants autour de moi, d’une région dans laquelle je ne trouverai point de nourriture sur plus de 50 km, les gamins aux habits troué et puis soudain, au pied de moi : un caméléon. Petit, frêle, léger à en grimper sur l’herbe et grimper une trace de pneu comme je grimpe le Stelvio. Vert et les yeux globuleux, les pattes à trois doigts tout comme ses cornes qu’il a part trois, le Caméléon mérite qu’on le photographie et que l’on s’attarde un peu. Mais que dire des babouins ? A nouveau eux, mais cette fois dans un terrain un peu plus « arbreux », sautant de lianes en branches, tantôt à gauche tantôt à droite, jouant de moi et pour l’occasion tres difficile a photographier. Puis j’ai pénétré l’épaisse forêt, là où les gorilles vivent encore en liberté. 600 dollars… c’est ce qu’on me demanda pour les apercevoir. Pour moi c’est trop. 6 dollars sauvent une vie ici. 6 dollars c’est le prix pour un traitement pour la malaria, le choléra où je ne sais trop qu’elle autre maladie. L’immoralité fait certainement partie du jeu quand tu voyages en Afrique mais là, c’est trop. Alors de Gorille il n’y en a pas eu mais c’est chez l’habitant que j’ai terminé cette inoubliable traversée. 7 heures de route pour 70 km de chemin, mais au final , tout comme le jour précédent au Queen Elizabeth National Park, des souvenirs à n’en plus finir…

A travers l’épaisse forêt de Bwindi

Après une quinzaine de kilomètres plutôt tranquilles je pénètre enfin dans l’épaisse et « impénétrable »forêt de Bwindi. Là soudain je me trouve entouré d’une végétation incroyable, épaisse. Tout est vert et je n’aperçois même pas le tronc des arbres, recouverts de feuilles et autre végétations. Le bruit dégagé par la faune est incroyable, j’entends notamment nombreux bruits d’oiseaux ainsi que quelques cris de singes. Un peu comme au zoo.

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Le bruit dégagé par la faune est incroyable, j’entends notamment nombreux bruits d’oiseaux ainsi que quelques cris de singes

 

 

Parfois j’en entends qui sautent au-dessus de moi, passant d’arbres en arbres avec une agilité hallucinante. Au bout d’une quinzaine de kilomètres dans cette épaisse forêt ma route se met à grimper sévèrement et je sors rapidement de la forêt, la surplombant et apercevant les vastes vallées en contrebas. Je suis maintenant à plus de 2’000 mètres d’altitude, le ciel se couvre mais la vue est belle.

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le ciel se couvre mais la vue est impressionnante.

 

Dès lors j’enchaîne les km de montée, la pluie arrive mais heureusement reste faible. J’avance ainsi, lentement, à une vitesse comprise entre 6 et 8 km/h. Soudain j’aperçois un petit lézard, tout petit, très lent, sur le bord de la route. J’ai failli l’écraser! C’est un caméléon. Superbe! Ce lézard est magique, impressionnant et semble venu tout droit autre temps…

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J’ai failli l’écraser! C’est un caméléon.

Mais pas très vif, il ne m’est pas très difficile de le transporter, sur bâton, de l’autre côté de la route, en sécurité. Non sans avoir oublié de bien l’admirer…

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on sans avoir oublié de bien l’admirer…

 

En route vers le Rwanda

Le soleil revient enfin et plus de 6 heures de pédalages après mon départ de la petite église de ce matin j’arrive  enfin au sommet de cette interminable montée. Soulagement… La vue est impressionnante, l’instant est magique, la forêt qui m’entoure crie toujours à pleins poumons, j’entends des singes, des oiseaux et d’autres bêtes que je ne saurai nommé. Alors vint la descente, belle, surprenante, sur pistes également… Et sans surprises mais non sans souvenir, j’ai quitté l’impressionnante forêt impénétrable de Bwindi.

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j’arrive enfin au sommet de cette interminable montée. Soulagement… La vue est impressionnante, l’instant est magique

 

 

Alors, après une dernière nuit chez l’habitant dans le petit village d’Ikumba chez la famille de Barry qui m’invita lorsqu’il m’appercu epuise en bord de route, c’est humide que j’ai repris ma route ce matin. Et me voici déjà à quelques kilomètres du Rwanda. La pluie est revenue, mais le soleil reviendra, c’est comme ça. Et après 17 jours et un peu plus de 1000 km en Ouganda il est temps, déjà, de me tourner vers un nouveau pays, plus petit, plus montagneux: le Rwanda…

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après une dernière nuit chez l’habitant dans le petit village d’Ikumba

 

Olivier Rochat

 

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